• Homélie du 8ème dimanche du Temps Ordinaire

    Homélie :

             Une lecture rapide de l'évangile d'aujourd'hui nous induirait en erreur. Jésus aurait-il condamné l'argent ? Aurait-il invité à la paresse ? Aurait-il conseillé de ne pas prévoir et gérer les dépenses de son budget ? Non, bien évidemment. 

             « Aucun homme ne peut servir deux maîtres... Vous ne pouvez servir à la fois Dieu et l'Argent...» Voilà la clé qui ouvre le sens de cet évangile.

             Jésus ne condamne pas le fait d’avoir de l'argent mais bien de         " servir l'argent " : Lui qui, à Nazareth, avait travaillé comme charpentier, lui qui a reproché au mauvais serviteur de ne pas avoir fait fructifier son argent à la banque dans la parabole des talents, ne condamne pas l’usage de l’argent mais condamne le risque de ne penser qu’à l’argent.

              « Le Seigneur est mon appui : il m’a dégagé, m’a donné du large, il m’a libéré, car il m’aime ». L’Evangile, la Parole de Jésus veut nous libérer de nos esclavages.
             Jésus choisit aujourd’hui, pour exemple d’esclavage : notre relation à l’argent.

             L’argent est nécessaire comme moyen d’échange de biens et de services, mais il est dangereux quand il devient un but, un objectif de chaque jour, on peut alors le comparer à une idole.

             Dans cette quête unique de l’argent pour l’argent, Jésus nous dit que nous pouvons nous enfermés dans nos peurs : peur de l’avenir, peur de l’autre, peur des imprévus, peur des revers de fortune ; aussi nous sommes alors dans la recherche de sécurité, d’assurances en tous genres, en pensant que l’argent nous protège de tous les aléas de la vie.

             Souvenons-nous de cet autre passage d’Evangile qui nous parle d’un propriétaire dont les terres avaient beaucoup rapporté et qui se disait : « Te voilà avec des réserves en abondance pour de nombreuses années. Hé bien maintenant, repose-toi, mange, bois, jouis de l’existence. Mais Dieu lui dit : “Tu es fou : cette nuit même, on te redemande ta vie. Et ce que tu auras mis de côté, qui l’aura ?” ». Et Jésus de conclure : « Voilà ce qui arrive à celui qui amasse pour lui-même, au lieu d’être riche en vue de Dieu » (Lc 12, 16-21).

             Heureux celui qui peut dire avec le Psalmiste : « Je n’ai de repos qu’en Dieu seul, mon salut vient de lui : lui seul est mon salut, la citadelle qui me rend inébranlable » (Ps 61) ; il ne sera pas déçu, car il a mis dans le Très-Haut son espérance. Cela ne signifie pas qu’il sera à l’abri des épreuves, mais celles-ci vérifieront la qualité de sa foi, de sa confiance en Dieu.

             Saint Jacques dans sa lettre nous dit aussi : « Mes frères, quand vous butez sur toute sorte d'épreuves, pensez que l'épreuve vérifie la qualité de votre foi, produit en vous la persévérance, et la persévérance doit vous amener à une conduite parfaite ; ainsi vous serez vraiment parfaits, il ne vous manquera rien » (Jc 1, 2-4).
             Le Seigneur ne nous demande pas de nous retirer du monde pour bannir tout usage de « l’argent trompeur » (Lc 16, 9). Ce que Jésus récuse, c’est de servir l’argent et de lui être asservi, au lieu de nous servir de l’argent pour faire le bien.    Notre relation à l’argent - comme toutes nos relations d’ailleurs - doit être ajustée à la Révélation du vrai visage de Dieu : « Votre Père céleste sait ce dont vous avez besoin ». Notre-Seigneur veut nous conduire de l’état d’esclave de l’argent trompeur, à celui de fils dans la maison de son Père.

             C’est donc une double idolâtrie que Jésus dénonce, l’une entraînant probablement l’autre : l’idolâtrie d’un Dieu lointain, exigeant, indifférent aux besoins de l’homme ; et l’idolâtrie de l’Argent.

             Telle est l’attitude de ceux qui ignorent le vrai visage de Dieu.

             Ceux qui se savent enfants du Père, travaillent certes pour subvenir aux besoins des siens, et participent au bien commun de la société ; mais ils le font dans la liberté filiale, c’est-à-dire dans la certitude que Dieu est avec eux dans leur effort comme dans leur repos, dans leurs succès comme dans leurs échecs.

             De maître, l’argent, devient alors serviteur pour le croyant. Son souci n’est plus de sauvegarder sa vie à n’importe quel prix, car il croit qu’il reçoit la vie à chaque instant de Dieu le Père comme un don d’amour.

             Ainsi le croyant travaille en ne pensant pas qu’à lui-même mais en pensant à chacun.
             « Tu es vraiment saint, Dieu de l’univers, et toute la création - les oiseaux du ciel et les lys de la terre - proclament ta louange car c’est toi qui donnes la vie, c’est toi qui sanctifies toutes choses, par ton Fils, Jésus-Christ Notre-Seigneur, avec la puissance de l’Esprit Saint” (Prière Eucharistique n° 3).

             Donne-moi Seigneur, assez de confiance pour te confier chaque jour de ma vie, et ne chercher jour après jour que la joie de vivre dans la foi et la confiance.

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